lundi 29 novembre 2010

Un Goncourt des riches : La Carte et le Territoire de Michel Houellebecq - Flammarion -2010

Michel Houellebecq a travaillé comme un moine bénédictin avec Google sur son bureau. Il a suivi l'exemple de son ami Beigdeber, enserrer son texte dans un réseau inextricable de publicité voilé, de célébrités, de sujets à la mode, de problèmes existentiels, d'analyse du présent architectural et pictural, de "drames" personnels, de rapports familiaux "France XXI siècle" etc. Tout ce que véhiculent Jean-Pierre Pernault, Julien Lepers et "Questions pour un champion", les infos, les "Arlette Chabot", etc. Michel Houellebecq ne pouvait pas ne pas recevoir le "Goncourt". C'est le Goncourt de la consécration de ce début de siècle du consumérisme à outrance, où tout est dans tout et en fait dans rien. Michel Houellebecq est un philosophe du désespoir, et il enrobe son propos des fleurs de la rhétorique d'aujourd'hui que sont Mercedes ClasseA métallique, Artprice, Francis Bacon, Jésus-Laguiole, TF1, Théorie de Popper, Nespresso, Tocqueville, Michelin, Bille Gates, Steve Job, Grotius, le Bauhaus, Stella Artois, Carlos Slim Helu, Bugatti Veyron 16,4 Fourier, Pré-Raphaélistes, Byzantinesque, François Pinault, Ryan-Air par Beauvais-Tillé, Fnac, Nikon-D3x, Leader-Price, Carrefour, Casino etc. etc. De quoi remplir un Bottin-mondain nouveau style. Tout ceci à travers l'histoire d'un photographe-peintre, fils d'un riche promoteur de plages pour Jet-riches (Abou-Dhabi etc.)(toujours riche...pas de loser dans son univers, sauf la "loserie" pour tous dans la mort). D'ailleurs son promoteur de père se fera euthanasié en Suisse, après avoir quitté ses "affaires" à cause de son âge...(mouroir de riches etc.)
Le truc pour exciter les Goncourt, c'est de faire apparaître l'auteur soi-même, c'est-à-dire Houellebecq en personne, comme auteur, et de le faire mourir, pour donner lieu à une enquête abracadabrantesque dans les milieux des super-extravagants-riches amoureux des insectes... De quoi ravir Bernard Pivot, Didier Decoin etc.
Un livre pour riches, pour cadres intellos branchés.
Il y en a pas mal, d'après le nombre de ventes de Livre-Hebdo : 300/400.000 exemplaires.
Style "lisable" sans plus.
12/20
Hermès

dimanche 28 novembre 2010

Des gens sans importance...

La nouvelle est tombée : la première victime de la vague de froid de ce début d'hiver est une pauvre femme de 40 ans, SDF, à Marseille. L'an passé, il y a eu, 385 sans abris qui sont morts de froid. Cette année combien ?
Il y a des "maraudes", l'intervention de la police, les appels sur le 115, mais tout ceci, année après année, est vain. Il y aurait plus de cent mille sans abris en France, peut-être plus... Tout un quartier de Paris, la moitié de Strasbourg, un quart de Nice... Et on n'arrive pas à solutionner le problème... TGV, Aérospatial, lutte contre le Sida, recherches médicales etc. Mais on n'arrive pas à sauver le SDF qui est dans la rue, mort de froid...
Il pleut sur les grandes entreprises, les grands financiers, les grands partis politiques, les grandes causes économiques, planétaires des milliards de dollars, d'euros... On pleure dans les cathédrales, les églises, les temples, les mosquées, les pagodes.
Des gens sans importance... qui font mal au coeur.
Hermès

vendredi 26 novembre 2010

La Vie d'Arséniev d'Ivan Bounine, Bartillat Editions 2005, 478p.

Ce roman est un petit bijou à placer dans sa bibliothèque pour en relire des passages de temps en temps. Ivan Bounine (Ivan en russe = Jean) est un auteur de la diaspora russe de 1917. Il a fui la Russie de Lénine,Trotsky, Staline etc. mais il a emporté avec lui l'âme russe, ce qui est considérable. Pendant que ses compatriotes pleuraient, se lamentaient aux sons des balalaïkas, il écrivait, écrivait, et il a pondu des chefs d'oeuvre dont sa "Vie d'Arséniev", et l'Académie de Stockholm lui a décerné le prix Nobel de Littérature en 1933, avec lequel il a pu vivre et écrire à Grasse. Ce livre respire la jeunesse, l'amour de la vie, l'étonnement devant elle, sa découverte petit à petit, avec un esprit fort et sensible à la fois. Ce qu'il y a d'étrange c'est que les Français ont créé leur littérature, c'est à dire, leur façon de penser, d'être, dès le plus haut Moyen-Age avec, entre autres, Le Roman de Renard, La Chanson de Roland, Chrestien de Troyes et ses Chevaliers de la Table Ronde, Lancelot, puis les chroniques sur les Croisades, les chroniques royales, tout ceci continuant la littérature de l'Antiquité sauvée par l'empire byzantin, Venise, les abbayes et pour certaines oeuvres par des savants arabes. Pour la Russie, sortie des ombres des dominations mongoles, tartares, teutoniques, polonaises, il lui faudra, après la conquête des Terres russes sous Ivan le Terrible, l'amour que la steppe, la neige, la beauté de la nature de la Baltique à la Mer Noire, le Pont-Euxin de la Crimée peuplée de Grecs orthodoxes, l'Orthodoxie, pour qu'éclose et se développe la Littérature et la pensée russes. Ce sera alors l'éclosion d'immenses talents comme ceux de Pouchkine, qui mourra stupidement dans un duel avec un noble français, Nicolas Gogol et son Tarass Boulba, Lermontov, Tourgueniev, dont une datcha est à Port-Marly, Tolstoï, de Guerre et Paix, etc. et aujourd'hui la pleïade d'auteurs russes du XX° et XXI°siècle. Ivan Bounine est de ceux-là.
C'est un livre à lire, si l'on veut être dépaysé, vivre dans de grands espaces avec des sentiments forts et subtiles, et laisser parfois le livre près de soi, les yeux ouverts, plongé dans une profonde rêverie...
19/20
Hermès

jeudi 25 novembre 2010

Théophile de Viau (1590-1626) Lettre à son frère

Lettre à son frère
(Extraits)

... Je verrai ces bois verdissants
Où nos îles et l'herbe fraîche
Servent aux troupeaux mugissants
Et de promenoir et de crèche.
L'aurore y trouve à son retour
L'herbe qu'ils ont mangée le jour,
Je verrai l'eau qui les abreuve,
Etj'orrai plaindre les graviers
Et repartir l'écho du fleuve
Aux injures des mariniers.

... Je verrai sur nos grenadiers
Leurs rouges pommes entrouvertes,
Où le Ciel, comme à ses lauriers,
Garde toujours des feuilles vertes.
Je verrai ce touffu jasmin
Qui fait ombre à tout le chemin
D'une assez spacieuse allée,
Et la parfume d'une fleur
Qui conserve dans la gelée
Son odorat et sa couleur.

Je reverrai fleurir nos prés ;
Je leur verrai couper les herbes ;
Je verrai quelque temps après
Le paysan couché sur les gerbes ;
Et, comme ce climat divin
Nous est très libéral de vin,
Après avoir rempli la grange,
Je verrai du matin au soir,
Comme les flots de la vendange
Écumeront dans le pressoir...

mardi 23 novembre 2010

De la sagesse en littérature... (Suite à une interview dans l'Express)

Les lecteurs se moquent pas mal que Marc-Edouard Nabe, ait habité dans le même immeuble que Michel Houellebecq dans le XV° à Paris. C'est formidable qu'il s'acharne à s'auto-éditer puisque les éditeurs se défilent. Ils se défilent pour des dizaines de milliers de manuscrits qui leur sont envoyés parce qu'ils n'y croient pas et ne veulent pas prendre de risque financier. C'est leur problème. Mais qu'un auteur, sûr de son talent, soutenu par pas mal de médias comme Ardisson, Taddeï etc. soit déçu de ne pas avoir un prix, frise le ridicule. Bien fasse à ceux qui sont élus, y compris Virginie Despentes dont je n'ai rien lu, ils sont bénis des dieux. Pour les autres, c'est le talent ou le génie qui compte. Stendhal a attendu 60 ans après sa mort pour être reconnu ! etc. Nabe dit ne donner que 20% du prix du livre aux libraires. Problème d'épicerie, il devrait leur donner 35%, et mettre 30% dans la promotion de ses bouquins : Journaux professionnels et divers, messages radio etc. "On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre". Peut-être pense-t-il ainsi compenser par des éclats, une promotion défaillante... Mais une promotion que l'on ne contrôle pas part en eau de boudin. Quant à un Prix, s'il en veut un vraiment, qu'il le crée
comme bien d'autres, et qu'il se couronne.
Hermès

dimanche 21 novembre 2010

L'Empoisonneuse d'Istanbul de Petros Markaris, traduction de Caroline Nicolas, Seuil Edit. 292p. 2010. Voyage sur le Bosphore

Virage à l'Orient toute ! Avec ce polar c'est la découverte d'Istanbul, autrefois appelée Constantinople, la seconde Rome, la ville créée par Constantin-le-Grand au IV° siècle près d'une autre cité antique grecque, Byzance, qui donnera son nom à l'empire romain d'Orient qui deviendra l'Empire Byzantin...
Voilà, nous sommes en plein dans l'Histoire avec ce roman. Le commissaire Charitos en balade avec sa femme sur le Bosphore se trouve enquêter sans le vouloir sur une série de meurtres au fameux fromage "féta", enrobé dans une célèbre pâte feuilletée, délice dénommé TYROPITA. Une vieille femme de 90 piges poursuit de sa froide vengeance ceux qui l'ont fait souffrir dans son adolescence. La Tyropita est un met qui se mange froid.
Cela permet à l'auteur de nous trimbaler à travers tout Istanbul-Constantinople, à travers ses rues, ses boulevards, ses fronts de mer, des marchés, ses églises, le Phanar, Sainte-Sophie, Topkapi etc. avec un interlocuteur bavard, son épouse grecque à l'excès, son homologue turc qui s'appelle Murat, comme le beau-frère de Napoléon, un groupe de Grecs en vadrouille en pullman, à la découverte du reliquat des millions de Grecs qui peuplaient l'Asie-Mineure, et que les "évènements" de 1921( Traité de Lausanne), la loi turque sur la fortune (Varliki) d'Ismet Inonu de 1942(La Grèce était occupée par les Allemands), puis les "re-évènements" du 6 et 7 septembre 1955, la crise chypriote etc. soit 2.000 "Roums" (descendants de Romains) qui y vivent encore au milieu d'églises, d'écoles fermées, de maisons abandonnées...

Une balade sur fond de désastre qui permet à l'auteur, qui est né à Istanbul-Constantinople, d'intéresser des milliers de lecteurs à travers le monde, tant le récit est bien mené, bien truffé de références historiques, avec un point de vue moderne, tranquille car "la Grèce est dans l'Europe", souligne l'auteur.
Une toute petite remarque pour la traduction : le diminutif du prénom Charalambos, n'est pas "Lambis", mais "Babis" ou "Baby".

Un livre à mettre sous le bras quand on va découvrir ces rives époustouflantes du Bosphore.
Note : 14/20
Hermès

PS. La traductrice Mme Caroline Nicolas me fait observer par mail qu'elle a trouvé "Lambis" dans le texte grec. Alors disons que l'auteur avait honte de ce "Babis" qui fait "Bébé" et qu'il a préféré ce "Lambis". Moi, j'aime bien avec la tradition "Babis" ou "Baby". Hermès-Baby

mercredi 17 novembre 2010

SILENCE

Silence des visages,
Gestes assourdis des rameurs,
Les mains jouent,
Châteaux de sable.

Mordre l’espace de tes lèvres
Figer le tremblement de ta gorge
Ton haleine court le long
De mon corps.

Le silence de Dieu
A brisé la glace
De l’Océan.
Il pardonne au Temps,
À toi, à moi, à tous.
Nos doigts dérangent
L’ordre de la
Solitude.

Henry Zaphiratos

jeudi 11 novembre 2010

Les BODIN'S, la mère, Maria et le fils Christian, un duo comique exceptionnel !

Paris-Première a remis ce soir au programme "Bienvenue à la capitale" et "Mariage chez les Bodin". Un programme comique exceptionnel par sa qualité, son humour, sa richesse de trouvailles, par le jeu subtile et rustre à la fois des deux comédiens : Vincent Dubois et Christian Fraiscinet, les créateurs, metteurs en scène, et interprètes de leurs personnages de paysans madrés, rigolos, de la mère possessive et qui fout des coups de boule, et du fils complètement taré, hurluberlu entre Bourvil et Tati. Deux pièces-films excellents, marrants, désopilants, foudroyants.
J'ai beaucoup aimé, nous avons beaucoup aimé.

Christian Bodin marié, et sa mère, la redoutable Maria, nous annoncent pour l'an prochain (Avril) un truc qui va être sensationnellement tordant "Le fabuleux destin D'AMELIE au pays des BODIN'S". A ne pas manquer.

Rigolade garantie.
Note : 18/20
Henry Zaphiratos

LE MATIN

Soleil rouge du lever
Soleil rouge du coucher
Du tableau de Cyrille.
Face à face dans leur splendeur.

Matin heureux de la vie
Où nous sommes à l’unisson
Avec le monde

La jeunesse et l’envie
Coulent en nous
Portant le plaisir et la joie

Soleil rouge du coucher
Soleil rouge du lever
Face à face dans leur splendeur.

Henry Zaphiratos

lundi 8 novembre 2010

Houellebecq et le Goncourt

C'est bien qu'il ait le Goncourt. Il est l'un de ceux, qui ont quelque chose à dire sur le monde dans lequel nous vivons. C'est un témoin brillant. Il a très bien compris la société du spectacle, qui est la nôtre, avec BDB comme pisteur c'était le succès de l'Odéon programmé. Il a aussi raison d'avoir la prétention d'être l'un des grands écrivains d'aujourdh'ui. Il faut être ambitieux, sûr de son talent. Les Goncourt n'ont pas voulu passer à côté d'une oeuvre qui, qu'on l'aime ou non, marque un moment de notre littérature.
Hermès

dimanche 7 novembre 2010

Les Déferlantes, roman de Claudie Gallay, Editions du Rouergue - 2008 "Style Medium Classe"

C'est un roman écrit pour la medium classe soumise à un stress permanent. Pas un mot de trop. Un style lisse, des histoires de gens modestes qui s'entrecoupent dans un petit port de pêche, près d'un phare, d'une maison quasi délabrée, d'un restaurant-bar, lieu de rencontre obligé des pêcheurs, des désoeuvrés, le tout battu par des flots le plus souvent déchaînés, à la pointe de la Hague, près de Cherbourg (là où la flotte de Tourville essuya la défaite navale de la Hougue).
La narratrice ornithologue, sortie de l'Université, a pour mission de décompter, et suivre les nichées des oiseaux de cette région de la presqu'île du Cotentin. On apprend qu'elle a quitté le sud de la France pour fuir le souvenir de son amant disparu. Dans ce coin perdu elle croise Lambert, un homme qui revient au pays pour vendre la maison de ses parents et retrouve des souvenirs douloureux. Les histoires se mêlent. Il y a celle que l'on appelle La Mère, une vieille édentée qui a gardé en travers les souvenirs des frasques de son mari, et qui, extrait :"lapait sa soupe comme un animal assoiffé...", la bistrotière, un sculpteur, Raphaël, et Morgane etc. Un petit monde que l'on découvre au fil des pages, un ton bas, taiseux ou peu loquaces, des sentiments enfouis dans des replis sombres, des gens de mer qui surveillent si des navires venaient à couler pour profiter des "épaves", comme celles de ce capitaine anglais Sir John Kepper, etc. L'histoire se déroule dans le fleuve tranquille de la vie, et se termine par l'amour retrouvé près du calme d'une abbaye montagnarde.

Claudie Gallay a choisi d'écrire aussi un ton "bas", presque chuchoté. Et quoique sa narratrice sorte de l'Université, elle lui fait parler "bistrot". Peut-être qu'institutrice, l'auteure a-t-elle douté des capacités littéraires de ses lecteurs. Ainsi tout le bouquin est-il truffé de : "...quoi ? elle a demandé" pour "demande-t-elle", "elle a continué" pour "continue-t-elle", "elle a grincé", ...j'ai dit.",pour "grinça-t-elle... ai-je dit "... il a dit" pour a-t-il dit, "... j'ai dit brusquement.", pour "ai-je dit brusquement" etc. Mais c'est vrai que cela aurait fait trop "écriture à la Balzac" et qu'un certain public que l'auteure et l'éditeur visent, n'aurait pas compris... Parfois l'auteure détaille les situations dans des phrases comme celles de cet extrait: "-On avait le même positionnement à l'école, son coude là et le mien juste à côté", pour "à l'école nous étions assis côte à côte".

Claudie Gallay raconte sur un ton neutre cette histoire de tous les jours. Et elle a eu raison : Le livre a trouvé un lectorat considérable, on dit qu'il s'en est vendu 300.000 exemplaires... Ce qui semble dire que l'auteure dans son langage feutré, "positionné CM2", a fait découvrir un monde d'entrelacs familiaux et sentimentaux à un large public qui était en manque d'histoires provinciales, où les hommes et les femmes sont "à l'ancienne", bien dans leur rôle respectif, où chacun écoute chacun, le coude sur le comptoir.
Note 12/20.
Hermès

jeudi 4 novembre 2010

La Dictature de la petite bourgeoisie, de Renaud Camus, Privat Editions, 2005, 134 pages,19€ . Quoi ? Cette petite Cocotte ?

C'est un livre fort intéressant qui ouvre une perspective sur notre époque et sur notre cadre social et politique. Renaud Camus, qui est un penseur et un philosophe, y parle à bâtons rompus avec Marc du Saune et expose ses idées. La France avec la "dé-culturation" accélérée de sa population : enseignants, magistrats, médias, hommes politiques, financiers, commerçants, industriels, fonctionnaires, etc. est "tenue" dans le carcan d'une "dictature" de la petite-bourgeoisie. Celle-ci, humiliée, dominée, exploitée durant des siècles par l'aristocratie et la haute-bourgeoisie, se venge en "avalant" et "digérant" tout ce qui faisait l'"exceptionnel" durant les siècles passés, c'est-à-dire, le beau, l'étrange, le superfétatoire,l'extraordinaire, la préciosité, le style, le beau langage, le fantastique dans le sublime... pour ramener l'ensemble des cerveaux, de la société, de la France, au moyen, au médiocre, au nul, à la "massification" du "culturel", de la "touristika", au langage populo petit-bourgeois, à l'argot fonctionnaire, enseignant, au jargon pseudo-pyschologico-littéraro-scientifico-philosophique... bref à l'écrasement de la pyramide de la société, à son nivellement par le bas. Plus d'aristocratie ? Plus de haute-bourgeoisie ? Plus de style ? Des diplômes dévalorisés ? Des baccalauréats du niveau de l'ancien Certificat d'Etudes ? Plus de Happy few dans les musées, mais des queues fantastiques pour "dire" j'y étais ? Plus de littérature ? Des bouquins, mais pas de "livre-livre". Plus de Victor Hugo, plus de Mauriac, etc. mais des livres sur les faits du jour, les chanteurs, les pipeuls... Un monde nouveau aseptisé, sans "passé", sans "ancêtres", qui est né du jour, voilà le monde que nous montre Renaud Camus.
Parce que pour lui, c'est le monde petit-bourgeois qui a envahi et tient la société toute entière, par le truchement du gouvernement, des médias, de la "bien-pensance".
On comprend alors pourquoi le cinéma d'Art-Essai n'existe pratiquement plus, pourquoi les émissions phares de littérature passent sur France-Culture entre minuit et 6 heures du matin, pourquoi les films du Ciné-club commencent à une heure du matin, pourquoi il n'y a plus de livres écrits avec un "style" d'auteur, ils sont rejetés systématiquement par les éditeurs, pourquoi Charles Dantzig explique dans la Grande Librairie que la lecture n'éveille aucun "rêve", ou quelque chose d'approchant, pourquoi c'est le nivellement par la dictature des "marques" etc.
Alors le pouvoir pris totalement, après Mai 68, il s'est passé de mains en mains à travers les gouvernements, les administrations, le corps enseignant, les parents d'élèves, les acteurs économiques, culturels etc. jusqu'à nos jours. Le couronnement est l'adoubement de Nicolas Sarkosy par Danielle Gilbert, en 2005, lors de son avènement à la tête de l'UMP, dixit Renaud Camus.
Depuis, pas mal d'eau a coulé sous les ponts de France.
Un livre passionnant.
Mais pourquoi ne pas dire carrément que la "petite-bourgeoisie" du livre n'est autre qu'un certain "petit socialisme" ? Que la vraie "petite-bourgeoisie" d'antan, si mignonne, se donnait des airs de "grande-bourgeoisie", même d'"aristocratie", d"hobereaux campagnards" ? Qu'elle recherchait, le beau, l'exceptionnel, que des centaines d'écrivains, d'artistes, de peintres (les impressionnistes, les cubistes etc., de philosophes (Bergson, Bachelard, etc.) de scientifiques, de politiques etc. sortaient d'elle ? Qu'elle n'était qu'une "petite-cocotte" ridicule à la Feydeau ?
La dictature dont parle Renaud Camus, semble être la "dictature" de ce "petit socialisme rampant" qui a pris la France dans son corset après De Gaulle et Pompidou, avec les ouvertures à droite et à gauche, et qui aspire, à coups de petites piqûres d'épingle, insensibles, à nous anesthésier, et nous conduire vers un monde sans ambition, un monde béat. Ce monde que craignait Tocqueville, Orwell...
Un monde encadré par des adjudants à la mine faussement bonasse.
Un livre à lire.
Henry Zaphiratos

mardi 2 novembre 2010

AD en colère, LIRE et François Busnel rectifient le tir dans le numéro de novembre de la revue.

AD, un lecteur de LIRE, leur a écrit : (extrait)"Je suis un abonné en colère. Vous sortez encore ce mois-ci(octobre) un numéro spécial sur les USA. Sauf erreur, le dernier du même genre remonte à peine à quelques mois. J'en ai assez de cette américanomanie littéraire qui vous conduit déjà en temps normal à consacrer une bonne part de vos critiques de romans étrangers, à des auteurs américains (ou anglais). Votre fascination pour les productions outre-Atlantiques a quelque chose de benêt et de malsain qui m'irrite profondément..."
Réponse de Lire (extrait): "Merci pour la colère, et qu'importe si elle n'est pas justifiée à 100%..." (lire la suite dans Lire de ce mois, si vous le désirez).

A plusieurs reprises j'avais noté cette tendance fâcheuse de LIRE de n'être que la "vitrine" des grands éditeurs, et particulièrement de celle des romanciers américains. Aujourd'hui François Busnel et LIRE en ont bien pris conscience et c'est tant mieux.
A noter dans cette livraison du mois, une très heureuse étude sur "Epicure" et le bonheur de vivre.

Je reviendrai sur cette maxime socratique : "CONNAIS-TOI, TOI-MEME !"
Henry Zaphiratos

lundi 1 novembre 2010

Julien Parme, de Florian Zeller, roman, Flammarion, 302p. 17€ - 2006

Voilà un livre-type d'un auteur qui désire à tout prix accéder le plutôt possible au Grand-Prix de l'Académie française, et à celle-ci. D'abord par le titre Julien Parme, stendhalien en diable, Julien évoquant Julien Sorel,Le Rouge et le noir, Parme comme La Chartreuse de Parme, puis le décalque de l'adolescent en fugue de "L'Attrape-coeur" le célèbre roman américain de Salinger, enfin l'ambition du héros de devenir écrivain. Extrait :"Alors qu'à la fin, je voulais devenir écrivain, avec cigares et interviews, et je faisais des rédactions de la mort qui déchiraient tout sur leur passage." Pour ce faire, Florian Zeller a effectué un travail intense : 302 pages ! dans le style dit "djeune". Comme il s'agit des vaticinations d'un adolescent de 14 ans qui tente de fuir sa mère, qui vit avec un homme qu'il déteste, à qui il pique la carte de crédit et tire mille euros à un distributeur de billets, ce qui lui permet de bien vivre sa "fugue" entre son copain Marco, Mathilde, les soirées, les boîtes de nuit, l'Hôtel du quai Voltaire etc. l'écriture voulue est celle d'un jeune d'aujourd'hui entre onomatopées, sms, message dans Facebook, Twitter etc. genre :"un truc incroyable","un putain de nom", "perso","sans déconner", "la déprime"," punitions délirantes" etc.
Au final, comme l'adolescent de Salinger rêvait de la Californie, Julien, lui, à moins que ce ne soit l'auteur, rêve de Rome, de Capri..., et tous deux rentreront en pleurs chez eux.
Il y a un petit distinguo, l'Américain a une petite soeur gentille qui l'aime et le convainc de rentrer à la maison, le Français, lui, a une demi-soeur vacharde qui le cravache et qu'il cravache.
On perçoit à travers le livre des influences cinématographiques :"Les Quatre cents coups" pour la révolte, "Les Nymphettes" pour les balades nocturnes dans Paris, "les Tricheurs" pour les scènes soirées entre copains, la séquence plage de Deauville d'"Un homme et une femme"...etc.
On sent le souffle de l'auteur aux côtés de Julien.
Un décalque pas très heureux d'un roman célèbre, un style "d'jeune" sans rythme de la pensée, sans profondeur, plat.
Note = 8/20
Hermès